FICA 2016 – Tharlo de Pema Tseden : Journey To The West

Posté le 6 février 2016 par

Le premier film en compétition de ce 22eme FICA de Vesoul, Tharlo, est une belle entrée en matière, brute et marquante.

La beauté de Tharlo, film sur un berger tibétain qui découvre la ville et fait face à l’évolution de la société, réside paradoxalement dans sa radicalité et son aridité.

Tharlo est un berger qui récite de but en blanc des préceptes de Mao ou le nombre de ses bêtes avec précision. Filmé plan serré, son visage marqué par des années de dur labeur inspire directement la sympathie. Le berger ne sait pas vraiment son âge, n’a pas de papier et vit en marge de la société. Il se mue en symbole d’une société passée, sans arrêt montré en décalage avec ce qui l’entoure.

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Ce qui semble manger Tharlo, c’est d’abord ce magnifique noir et blanc, qui donne une beauté sèche au film et à son personnage principal. On est immergé dans ce quotidien aride, cette contrée lointaine qui ne fait aucun cadeau.

Tharlo, malgré son personnage avenant au premier abord, diffuse une angoisse, un malaise qui colle à la peau. Le Tibet change, la société évolue,  l’influence capitaliste est de plus en plus prégnante. Le film ne parle que de cette peur ou presque. Des nouveaux mariés essaient des vêtements occidentaux « qui ne leur vont pas » selon la photographe. Les loups rôdent autour de la maison de Tharlo et l’argent est le vecteur de tous les vices.

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Tharlo évolue comme la société décrite dans le film. Tseden filme la déliquescence d’un homme, qui perd pied à mesure qu’il prend conscience. Le réalisateur s’interroge finalement sur la liaison entre le bonheur et la prise de conscience. L’évolution de Tharlo est stupéfiante. Ses traits se durcissent, son attitude change, l’abattement s’empare de lui.

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On reste subjugué par la beauté formelle du film et sa capacité à en dire énormément par l’image, loin de toute dérive illustrative. On se surprend à admirer un simple feu qui danse dans la nuit, ou juste le visage abîmé du berger. A chaque fois, l’image fait sens. Tharlo est une magnifique réussite.

Jeremy Coifman.

Tharlo de Pema Tseden présenté au FICA 2016.

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