DVD: coffret Hong Sang-Soo – Woman on the Beach et Night and Day

Posté le 9 avril 2013 par

Blaq Out gâte les fans d’Hong Sang- soo avec ce joli coffret contenant deux escapades entre la Corée du Sud et Paris, lieux de rencontres, de relations amoureuses contrariées et d’indécision totale. Woman on the Beach et Night and Day, deux petits joyaux du réalisateur coréen, enfin disponibles en DVD sous nos latitudes.

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Hong Sang-soo aime les mêmes structures, personnages ou situations. Il répète à l’envie un schéma réglé comme du papier à musique. Dans Woman on the Beach, il est question d’un réalisateur connu qui part en escapade au bord de la mer pour écrire son nouveau scénario. Son assistant l’accompagne. Evidemment, il y aura l’élément perturbateur, à savoir la petite amie de celui-ci, musicienne et fan du réalisateur. On sait pertinemment que le réalisateur va tenter de la séduire, qu’il va y parvenir. Dans Night and Day, Hong Sang-Soo va plus loin en transposant son univers à Paris. Pourtant, les enjeux restent les mêmes.

Mais l’important est ailleurs dans les deux longs métrages. Comme Jung-Rae, le réalisateur de Woman on the Beach l’expliquera avec un joli dessin à sa conquête naïve, on connaît par cœur maintenant  ce triangle « hongien », mais il est complètement idiot de réduire le cinéma du coréen à celui-ci. L’important est tout ce qui se passe en périphérie. Conscient de son petit manège, le réalisateur préfère se jouer des figures imposées et de ses propres clichés (scènes similaires à celles de Woman on the Beach dans Night and Day où le protagoniste principal, peintre de son état, parle des clichés qui jalonnent chaque œuvre et qu’il faut savoir aller au-delà de ceux-ci), et y apporte toujours la même fraîcheur et la même mélancolie.

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Tous les clichés du cinéma de Hong sont présents pour notre plus grand plaisir. Les hommes sont des artistes faibles, dragueurs, très portés sur l’alcool, amoureux transis, fuyant toujours plus. L’écriture d’un scénario pour l’un, un délit mineur étant excuse pour fuir pour l’autre. Les personnages de Jung-Rae et de Sung-Nam sont perdus. Il y a le chien qu’on abandonne lâchement ou l’oisillon tombé de son nid, et ce sentiment que sous les histoires de cœur se cache quelque chose de plus grave. On essaye de retrouver l’amour de sa vie, de braver sa peur de l’abandon ou de fuir un quotidien où les responsabilités sont trop fortes. En attendant, les deux protagonistes continuent de faire tout le contraire de ce qu’ils disent (la scène avec la bible de Night and Day très drôle), de tomber amoureux fou en quelques instants et de montrer leur virilité à tour de bras (le bras de fer avec le Nord-Coréen, l’hystérie au restaurant). Les variations sont infinies, mais les hommes, eux, ne changent jamais.

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C’est en cela que réside la beauté de ces deux films et du cinéma de Hong. Il y a l’inexorable, ce sentiment qu’on ne changera pas malgré tout. Pourtant, on continue d’y croire, malgré la pleine conscience de nos défauts, de nos sales habitudes. Les protagonistes, et a fortiori le cinéaste, sont en combat constant contre l’enfermement dans des cases, dans des conventions. Il y a ces moments de solitudes profondes, où les personnages se rendent compte trop tard de l’inconséquence de leurs actes (les pleurs dans le lit de Jung-Rae ou le suicide de l’ex-petite amie de Sung-Nam), mais il y a aussi et surtout cette volonté permanente d’être vu autrement, de sortir des carcans, comme une lutte intérieure du réalisateur, qui veut briser ses propres conventions.

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Woman on the Beach et Night and Day sont deux escapades formidables. Le cinéaste va encore plus loin dans Night and Day en transformant Paris (surtout le 14ème arrondissement) en petite Corée, preuve que l’univers du cinéaste est exportable n’importe où. Comme d’habitude, on plonge, on rit, et on se passionne pour les petits riens, les amours éphémères mais passionnés,  la justesse et la poésie absurde du cinéma de Hong Sang-soo. Puis cela se finit comme cela a commencé, rien n’a changé ou presque. Pourtant on reprendrait bien une tranche de vie made in Hong.

Jérémy Coifman.

Coffret Woman on the Beach édité par Blaq Out et disponible depuis le 9 avril 2013.