EN SALLES – Death (True)² et The End of Evangelion de Anno Hideaki

Posté le 4 novembre 2021 par

Eurozoom organise une sortie en salles des deux premiers films de la série mecha d’animation japonaise culte Neon Genesis Evangelion, Death (True)² et The End of Evangelion de Anno Hideaki en version restaurée et haute définition, le 3 novembre. Il s’agit de la première rétrospective au cinéma de ces films depuis leur sortie, en 1997, occasion rêvée pour les nouveaux fans d’assister au contenu de la série dans les meilleures conditions possibles.

Dans le cas méandreux de la franchise Evangelion, un brin de contextualisation, ainsi que de d’indications sur l’ordre de visionnage des films et de la série pour les profanes s’imposent. La saga débute en 1995 avec Neon Genesis Evangelion, une série animée de 26 épisodes. Le film Death (True)² est originellement en deux parties : Death, qui est un remontage des épisodes à quelques scènes près et Rebirth, qui constitue une fin alternative à celle de la série. La partie Rebirth de ce diptyque devient finalement le début de The End of Evangelion, long-métrage sorti en 1997, qui clôture la franchise en se substituant aux épisodes 25 et 26 de 1995. En effet, Anno ayant été frustré à l’époque du manque de moyens et de liberté artistique pour finir Neon Genesis Evangelion, a offert à sa franchise avec The End of Evangelion, un bouquet final à la hauteur de ses ambitions. Désormais, Evangelion compte également quatre nouveaux films dans sa diégèse, les Rebuild, qui reprennent l’intrigue de la série et de The End of Evangelion, tout en proposant encore une nouvelle suite et fin à l’histoire.

La série Neon Genesis Evangelion raconte l’histoire d’un monde pris d’assaut par les Anges, sortes de gigantesques créatures belliqueuses. Pour mener à bien le combat contre ces monstres, les organismes de défense des différents pays encore subsistants ont mis aux points des EVA, mi-organismes vivants mi-machines, que des pilotes doivent contrôler en entrant à l’intérieur. Pour des raisons logistiques, les pilotes en question sont de jeunes adolescents et nous suivons le parcours de l’un d’eux, Shinji, le fils du chef de l’organisme japonais de défense NERV, Ikari Gendo. Neon Genesis Evangelion débute avec un principe assez rodé et efficace où chaque épisode raconte le combat contre un Ange différent. L’intrigue débouche toutefois rapidement sur un tournant plus sombre, qui relate l’introspection et la psychologie des personnages principaux, tous en prise avec leurs traumatismes et angoisses propres. La série constitue la première étape obligatoire pour quiconque souhaite se lancer dans la franchise puisque c’est dans celle-ci que nous découvrons les enjeux, tant au niveau du monde d’anticipation que dépeint Anno que ceux auxquels font face les personnages, approfondis par la suite dans les films.

Death (True)² s’adresse alors à un public ayant déjà suivi la série, car le remontage non-linéaire du contenu de Neon Genesis Evangelion sert de récapitulatif davantage que de résumé de l’œuvre originelle. L’intérêt du long-métrage est de replacer les enjeux dans l’esprit du spectateur, tout en s’accordant parfaitement dans sa forme à la série qui le précède. Nous avons quitté Shinji et ses compagnons en pleine crise existentielle dans les derniers épisodes et Death (True)² semble ainsi être une plongée pour le spectateur dans un état similaire à celui des personnages. Tout comme les passages plus expérimentaux d’introspection présentés dans Neon Genesis Evangelion sous la forme de souvenirs épars avec des effets de montage expérimentaux, le public est amené à se remémorer l’anime sous ce même principe. Death (True)² mêle, par exemple, en montage alterné, la présentation d’Asuka et la fin de son parcours au sein de la même séquence, ce qui donne un aspect très perturbant et impactant à l’ensemble. Le film ne peut évidemment égaler le visionnage de l’intégralité de l’anime, mais en terme de reconstitution de l’émotion ressentie par le public devant la série, Death (True)² réussit le pari compliqué de dépasser ce qui pourrait n’être qu’un simple rappel des trames narratives et de l’évolution des personnages.

Sur le plan des émotions, cependant, c’est avec The End of Evangelion que nous touchons à l’apogée de ce que la franchise peut proposer. Anno offre une conclusion dantesque et bouleversante à son œuvre en dépassant même ses propres capacités démontrées tout au long de la série. Nous retrouvons l’équipe de la NERV, déjà bien secouée par les récents combats contre les Anges, dans une position de défense face aux armées internationales ainsi qu’à celle du Japon qui cherchent à s’emparer de leurs EVA. Pour couronner le tout, Gendo est désormais arrivé à la complétion de son projet secret visant à débarrasser une bonne fois pour toute l’humanité des menaces extérieures mais également de ses propres travers en tant qu’espèce. Le film s’organise en montée en puissance qui ne cesse de repousser les limites, qu’il s’agisse des destinées des personnages, tout comme du caractère formel parfois très expérimental de la franchise Evangelion. Shinji est plongé dans une ultime crise existentielle qui dépasse de très loin celles qu’il a pu expérimenter dans le passé et qui ne peut laisser indemne. Pourtant, même si le film est très percutant et que la représentation de la dépression a rarement été aussi approfondie et menée dans ses derniers retranchements que dans The End of Evangelion, le film refuse de céder au cynisme, ce qui devient sa force et lui donne encore plus d’ampleur. Anno réussit à faire de ses personnages des référents universels et même si on ne doute du fait qu’il s’agit d’une œuvre profondément personnelle, il touche très juste auprès d’un public divers et parvient tout autant à lui servir de catharsis qu’à lui donner de l’espoir. Alors qu’il prend des risques tout du long en assumant complètement ses ambitions démesurées, The End of Evangelion est un pur chef d’œuvre de maîtrise de son propos et offre à un excellent anime une densité encore décuplée. Le film se hisse aisément dans le panthéon de ce que l’animation japonaise a fait de meilleur et mérite même que l’on regarde la série dans le but de le découvrir.

Elie Gardel.

Death (True)² et The End of Evangelion de Anno Hideaki. Japon. 1997. En salles le 03/11/2021.

Imprimer


Laissez un commentaire


*