VIDEO – Le Gangster, le flic et l’assassin de Lee Won-tae : les ennemis de mes ennemis

Posté le 4 décembre 2019 par

Le polar dans le cinéma coréen contemporain, c’est l’équivalent du film de zombie dans le cinéma fantastique. Soit un genre qui donne l’impression d’être usé jusqu’à la corde et dont on se demande, à chaque nouveau film, ce qu’il va bien pouvoir apporter de neuf et d’original, sur le fond ou sur la forme. C’est dans ce contexte que sort Le Gangster, le flic et l’assassin, thriller énervé réalisé par Lee Won-tae, qui, s’il n’a pas forcément les épaules ni l’ambition pour révolutionner le genre, fait preuve d’une énergie folle pour raconter une histoire balisée mais prenante et jouissive. Le film, sorti en salles cet été, est édité en DVD et Blu-Ray depuis le 2 décembre.

On pourrait craindre le pire en regardant les premières scènes du film, tant elles ne semblent pas se différencier des multiples productions coréennes récentes au rayon thriller. Nous retrouvons encore des policiers aux limites de l’incompétence, des truands qui semblent gérer d’une main de fer des quartiers entiers de la ville et un tueur en série qui mène les forces de l’ordre par le bout du nez, ou plutôt du couteau, en l’occurrence. Mais rapidement, le script va prendre une direction intéressante, à défaut d’être foncièrement originale (M le maudit est déjà passé par là). En effet, l’assassin va avoir la mauvaise idée de s’attaquer au parrain local, brute épaisse interprétée par Ma Dong-seok (vu dans Dernier train pour Busan dans lequel il cassait du zombie entre deux wagons), et celui-ci, blessé physiquement mais surtout dans son honneur, va tout mettre en oeuvre pour lui régler son compte. Et pour cela, il va devoir s’associer à un flic ripoux qui s’est juré de capturer le tueur. Une belle association de voyous qui vont rivaliser de coups bas et de ruse pour arriver à leurs fins.

Le film ne déviera jamais de son chemin et proposera pendant près de deux heures un divertissement survitaminé qui ne s’arrêtera pour ainsi dire jamais. Sitôt que les deux hommes scellent une alliance que l’on devine fragile (le flic pourri reste un flic et garde en tête qu’il coopère avec le roi des crapules), c’est une course poursuite infernale qui se met en marche, et il y a quelque chose de franchement jouissif à voir deux hommes que tout oppose travailler main dans la main pour coincer un tueur. Mieux encore, le film arrive même parfois à se montrer lucide et juste dans sa vision de la relation entre forces de l’ordre et crime organisé. Les deux hommes exercent leur activité des deux cotés de la barrière morale, ou disons du badge de la Police, mais au final, face à un ennemi commun, ils vont se découvrir des méthodes similaires où parfois les poings et la violence apportent plus de résultats que de longues enquêtes et interrogatoires. Faut-il se comporter comme un voyou et le dernier des pourris pour arriver à ses fins ou patiemment attendre le faux-pas du tueur pour lui mettre le grappin dessus, quitte à accumuler les victimes ? C’est le dilemme moral auquel est confronté le flic qui va tenter de rester droit dans ses bottes face à un gangster qui est prêt à retourner la ville pour tuer celui qui l’a déshonoré, quitte à le priver de procès. Deux visions de la justice s’opposent ici, et le film se garde bien de choisir un camp.

Si le film pose parfois ce genre de questions, la réflexion finit souvent par être reléguée au second plan, laissant la place à de l’action sans fin. Au moins il n’y a pas tromperie sur la marchandise, l’amateur de thriller rayon castagne peut être ravi. Le réalisateur met en scène une chasse à l’homme urbaine survoltée, qui tient autant de la course poursuite que de la compétition entre deux camps que tout oppose. Le scénario n’oublie jamais de rappeler que la chasse au tueur n’est qu’une pause tacite entre le flic et le gangster, et la capture du dit tueur mettra fin de facto à leur alliance, les ramenant chacun à leur côté respectif de la loi. En attendant, ils vont donner le meilleur, et surtout le pire, d’eux-mêmes pour coincer l’assassin, et adopter les mêmes méthodes, ce qui nous vaut des scènes d’action ultra jouissives, à l’image de cette séquence d’anthologie qui voit les deux hommes tomber dans un guet-apens et obligés de jouer des poings pour s’en sortir, en se protégeant mutuellement face à la déferlante de coups. A la technique rapide et ordonnée du flic s’oppose la force brute et destructrice du gangster, pour un résultat similaire. Jusque dans ses derniers instants, le film offrira généreusement du spectacle, de l’action et du suspense, et osera même un dénouement que l’on qualifiera de parfaitement raccord avec ce qui a précédé, soit un ultime pied de nez irrévérencieux, immoral mais jouissif.

Le gangster, le flic et l’assassin remplit donc parfaitement son contrat et offre au spectateur un polar à l’énergie folle, rempli d’action, immoral au possible mais jouissif à force d’aller toujours plus loin dans le concept de l’association de pourris, le tout porté par deux montagnes de charisme, Ma Dong-seok et Kim Mu-yeol, parfaits dans leurs rôles respectifs de parrain violent et de flic obstiné mais faillible.

Les Bonus :

HK Vidéo propose une courte featurette qui fait le job, dans laquelle interviennent réalisateur et comédiens, et qui revient sur l’implication physique de ces derniers pour rendre crédibles leurs personnages. Un court mais bon complément au film.

Romain Leclercq.

Le Gangster, le flic et l’assassin de Lee Won-tae. Corée. 2019. En DVD et Blu-Ray chez Metropolitan FilmExport le 02/12/2019

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